Le moment semblait venu de parler un peu de cinéma. Hier sortait sur les écrans français le film britannique et irlandais de Pete Travis « Omagh », avec Stuart Graham, Gerard McSorley et Michèle Forbes. Loin des films hollywoodiens sur l’Irlande, depuis « The Quiet man » de John Ford, avec John Wayne et Maureen O’Hara, à « The Devil’s Own » d’Alan J. Pakula, avec Harrison Ford et Brad Pitt, il reprenait le modèle de caméra à l’épaule de Paul Greengrass, dans « Bloody Sunday », avec James Nesbitt et Gerard McSorley. De fait, ces deux films peuvent apporter une vision du conflit nord-irlandais autre que celles biaisées par le cadrage forcément « loyaliste » des actualités britanniques et par le romantisme « nationaliste » du cinéma américain. En proposant une plongée au cœur de l’événement, sans porter de jugement, mais en tentant d’atteindre une objectivité historique, ces deux films font plus pour la résolution du conflit nord-irlandais que tous les discours de la famille Paisley. Ils permettent de saisir tout le désarroi d’une communauté privée de ses droits les plus élémentaires, capable des plus hauts faits à la Mike Connelly comme des plus infâmes dérives.
Pourtant, cet hymne à la verte Erin ne sera pas pour aujourd’hui. Ce matin, le Figaro de ce matin titrait franchouillardement : « La charge de Chirac contre l’Europe libérale ». Qu’a dit le président français ? « Le caractère outrancier des propositions initiales de la directive sur les services a eu pour effet, à juste titre, de mobiliser l’opinion », a-t-il expliqué. Il a rendu une hommage appuyé à la manifestation « parfaitement digne et parfaitement déterminée » organisée contre ce texte le 19 mars à Bruxelles par les organisations syndicales européennes, qui ont mobilisé soixante mille personnes dans les rues de la capitale belge. Néanmoins, a-t-il poursuivi, « nous sommes prêts a étudier les modalités d’une ouverture du marché des services, à condition que ce soit un marché qui permette de tirer tout le monde vers le haut et non vers le bas ». Il a estimé qu’une telle ouverture profiterait à la France, « premier exportateur de services en Europe ».
Cette foutue directive Bolkestein, acceptée il y a dix-huit mois sans la moindre récrimination des pays membres, qui l’ont entérinée lors du sommet de Lisbonne, ou des deux commissaires français de l’époque, Michel Barnier et Pascal Lamy, est en train de plomber le référendum français. Et d’un effet de manche, le « Chi » de l’Elysée espère ramener le calme dans la maison France. Mais il restera toujours cette ambiguïté franco-française autour de cette idée de libéralisme. Dans ce « cher et vieux pays » archéo-socialiste qu’est la France, cette idée terrorise, au point de faire de ses défenseurs de violents extrémistes. Il est vrai qu’Alain Madelin, jeune étudiant en droit, était à Occident, mais il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis et les jospinistes trotskistes ! Il est tout aussi vrai que l’idéologie libérale est assimilée à l’économie et aux politiques de déréglementations reaganiennes et thanatopraxies. Mais le licenciement des contrôleurs aériens américains ou le pourrissement de la grève des mineurs de charbon anglais a peu à faire avec le libéralisme. Maurice Thorez, secrétaire général du Parti communiste français, n’avait-il pas déclaré à la France du Front populaire : « Il faut savoir finir une grève » ?
Le libéralisme est inhérent à toute société démocratie, qu’elle soit capitaliste ou non. Les Français, habitués à leurs avantages acquis par la doucereuse propagande socialo-communiste, en ont oublié cette réalité depuis longtemps. Et combien même, la culture de l’avantage acquis n’est pas incompatible avec le libéralisme, mode d’ordonnancement politique fondé sur la liberté. Liberté de penser autrement, liberté de publier, liberté de travailler, liberté de ne rien faire… La « main invisible » d’Adam Smith explique aussi que des limites à cette liberté existe. Cet encadrement, comme la justice sociale, n’est absurdement pas incompatible avec le libéralisme.
Le libéralisme est intrinsèquement lié à la liberté. On sait ses errements depuis la Révolution française et peut-être faut-il rechercher dans cette direction cette méfiance tout aussi intrinsèque des Français ? Tout comme il convient de rechercher du côté de la Glorieuse révolution anglaise cet attachement britannique au libéralisme. Les policiers ne sont pas armés, mais pourtant respecté, et tout un chacun peut vivre libre. Sauf un catholique, surtout s’il est nord-irlandais bien sûr…
24.3.05
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