Six mois avant la date prévue pour l’ouverture des négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne (UE), la répression brutale d’une manifestation organisée à Istanbul le 6 mars pour célébrer la Journée internationale des femmes n’a pas contribué à apaiser les inquiétudes des Européens. L’ajournement par l’UE de l’ouverture des négociations avec la Croatie, accusée de ne pas coopérer pleinement avec le Tribunal pénal international de La Haye, a été présentée à Bruxelles et compris à Ankara comme un avertissement aux autres candidats, à commencer par la Turquie.
La Turquie a donc fait un geste, lundi 28 mars, en acceptant d’étendre, aux dix nouveaux pays issus de l’élargissement, l’accord douanier qui la lie aux quinze anciens membres de l’UE. Dans une lettre adressée à la Commission européenne, la Turquie a fait savoir qu’elle approuve le texte du protocole qui prévoit l’extension de l’accord douanier.
Cette question avait été la principale source de discorde entre Ankara et les Vingt-Cinq au Conseil européen de décembre 2004, qui avait fixé au 3 octobre l’ouverture des négociations. Le premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, avait alors refusé de parapher le protocole, comme le lui demandaient les Vingt-Cinq, tout en se disant prêt à le signer ultérieurement. La lettre reçue par la Commission tient lieu de paraphe, explique l’entourage du commissaire à l’élargissement, le Finlandais Olli Rehn, en attendant la signature, qui devra intervenir avant le 3 octobre.
Les autorités turques soulignent avec insistance que l’extension de l’accord douanier aux nouveaux pays de l’Union, dont Chypre, ne constitue en aucune manière une reconnaissance implicite de la République de Chypre, avec laquelle Ankara n’entretient pas de relations. La Commission convient que la signature du protocole n’équivaut pas à une reconnaissance « officielle et formelle » de Chypre. Elle considère toutefois cette approbation comme une reconnaissance de fait. En décembre, le Premier ministre néerlandais, Jan Peter Balkenende, qui assurait la présidence de l’Union, avait estimé que l’extension de l’accord douanier marquerait « une étape importante » vers une reconnaissance. Le document doit encore être approuvé par les gouvernements des Etats membres, à l’occasion d’un prochain conseil des ministres des affaires étrangères.
Le ministre turc des affaires étrangères, Abdullah Gül, a affirmé que le protocole ne s’appliquerait qu’à la libre circulation des marchandises, et non des services. La Turquie ne serait donc pas obligée d’accueillir des bateaux ou des avions chypriotes dans ses ports et ses aéroports. Krisztina Nagy, porte-parole d’Olli Rehn, précise que cette distinction ne figure pas dans le texte du protocole et que l’interprétation des autorités turques est une violation de l’accord douanier. Au cours d’une récente visite en Turquie, le commissaire européen avait relevé d’autres manquements d’Ankara à son accord douanier avec l’Union européenne. Il avait jugé l’attitude de la Turquie « inacceptable » et « difficile à comprendre » de la part d’un pays qui aspire à entrer dans l’Union.
D’autres conditions imposées par Bruxelles à l’ouverture des négociations peuvent encore être opposées à la Turquie. Elle doit ainsi continuer sa politique de réformes, en particulier mettre en vigueur six textes législatifs qui portent, pour l’essentiel, sur l’adaptation de son système judiciaire. Or, la Commission s’inquiète du retard que prend le gouvernement turc. Olli Rehn a jugé « compréhensible » que la Turquie observe « une courte pause » après avoir accompli une série de réformes « audacieuses » et « significatives ». Il ne l’en a pas moins enjoint à ne pas relâcher ses efforts, souhaitant que cette politique de transformation continue « au même rythme et avec la même intensité qu’au cours des mois précédents ». Sinon…
5.4.05
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