Depuis douze jours, la planète tourne au rythme des réunions mondaines, consécutives à la mort des uns ou au mariage des autres. La logique médiatique faisant que l’actualité internationale ne supporte qu’un événement majeur, le reste, c’est-à-dire peut-être l’essentiel est passé à la trappe. Qu’il s’agisse des mouvements tectoniques d’Indonésie ou du Japon, des purges des services de sécurité ou du sort des otages roumains en Irak, de la hausse continuelle du pétrole, il n’y en avait que pour Jean-Paul II, Rainier, Charles et Camilla. Maintenant que l’actualité semble reprendre ses droits, la fenêtre qui sépare des obsèques monégasques et de l’ouverture du conclave, avant celle menant à l’élection du nouveau Pontife romain, reste encore trop étroite. La visite d’Ariel Sharon à George Bush, au ranch de Crawford, portant en elle les germes de désillusions futures, mobilise toutes les attentions.
Pendant ce temps, les « comptoirs » et les « Terrae incognitae » continuent à vivre à leurs rythmes. Ainsi, le Premier ministre chinois, Wen Jiabao, était hier à New Delhi pour rencontrer son homologue indien, Manmohan Singh. La nouvelle peut être incongrue tant les deux pays apparaissent antagonistes. Et justement, la raison de ce voyage visait à régler certains de ces problèmes, et non des moindres puisqu’il s’agit de leur irrédentisme himalayen. Alors qu’elle n’hésite pas à jouer la crise en ce qui concerne les îles revendiquées, qu’il s’agisse des Spartley ou de Taïwan, la Chine se montre plus prudente avec l’Inde. L’argument nucléaire n’est pas prégnant, dans la mesure où il ne l’a pas été auparavant et n’a jamais empêché les deux pays de se quereller.
Cependant, la question kirghize agite autant Pékin que Moscou. Dans l’optique de son développement économique, déjà porteur de déséquilibres sociaux préoccupants, la Chine se doit de stabiliser sa population turcophone du Xinjiang, en heurts avec les colons han. La Russie ayant été incapable de stabiliser l’ancienne frontière sino-soviétique, face à la menace d’une déstabilisation de la région si l'agitation nationale se doublait d'une agitation religieuse, le partenariat stratégique avec la Fédération russe de 1996 nécessitait d’être rééquilibré. La Chine s’est donc tournée vers l’autre Grand régional, l’Inde. Les pays d’Asie du Sud-Est ne forment pas un contre-poids géopolitique pour la Chine tant sa diaspora est bien implantée économiquement et les litiges frontaliers sont peu importants.
Avec New Delhi, il y a trois mille cinq cents kilomètres de conflits territoriaux possibles, qu’il s’agisse d’Aksai Chin, une zone désertique contrôlée par Pékin depuis 1962 dans un Cachemire déjà bien agité, de l’ancien royaume de Sikkim, annexé par l’Inde en 1975, ou Arunachal Pradesh que la Chine revendique. La réunion d’hier avait pour objet de régler tout cela. Mais, en arrière plan, se profile déjà un nouveau partenariat stratégique, fondé sur un accord de libre-échange. Les recommandations de l’Organisation mondiale du commerce semblent avoir été bien comprises par les communistes chinois… Le commerce entre les deux Etats représentait moins de trois milliards de dollars en 2000. D’ici dix ans, il devrait dépasser les trente milliards…
12.4.05
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