21.1.05

La guérilla irakienne (2)

Comment les partisans intègrent-ils les forces ? Toutes les recrues sont contrôlées. Mais les dégâts de la guerre, surtout suite aux pillages des bureaux du régime honni, rendent difficile toute vérification. Soit les informations manquent, soit elles sont partielles, invérifiables, voire périmées. De plus, les Irakiens manquaient de personnels suffisamment probes pour mener les enquêtes sur des milliers de soldats et de policiers qui s’enrôlaient chaque mois. Il fallait les interroger, leur faire passer des tests physiques, évaluer leurs performances professionnelles. La question de la loyauté envers le nouveau gouvernement n’était pas des plus fondamentale, allant presque de soi. D’autant que chaque recrue devait fournir au moins une référence de leur ville ou village qui était déjà connue des autorités comme l’a déclaré le général Babaker Shawkat Zebari, chef d’état-major de l’armée irakienne, dans un entretien avec le Chicago Tribune. Les agents de renseignement irakiens, entraînés par les Américains, devaient ensuite vérifier ces références et examiner le passé des recrues.
Finalement, les noms étaient passés au crible des bases de données de la CIA et d’autres organismes américains, afin de voir s’ils n’avaient pas été condamnés récemment. Ce contrôle est devenu plus aléatoire depuis que le gouvernement irakien a retrouvé, en juin 2004, sa souveraineté., a reconnu le lieutenant-colonel Dan Wilson, chargé des opérations courantes du 1st Marine Division, à l’Associated Press après l’attenta de Mossoul. Même avant juin, le commandement irakien avait l’habitude de faire confiance à leurs homologues irakiens pour le contrôle de leurs forces, parce qu’ils étaient familiers des usages locaux et plus aptes à juger du passé des recrues. Mais les contrôles des simples agents étaient généralement expédiés rapidement. En décembre 2003, The Washington Post a reporté que, dans un poste de Bagdad, il consistait en un simple entretien de deux minutes pendant lequel le commandant irakien analysait le passé et les opinions politiques des candidats.
De fait, les contrôles ne sont évidemment pas uniformes. Ce qui est possible avec la petite armée irakienne — quelque 4 100 hommes -— ne l'est pas avec la police, forcément plus nombreuse. Aujourd’hui stabilisée autour de 53 000 hommes, elle en avait compté jusqu’à 84 950 en octobre 2004. Bien que les autorités irakiennes aient toujours affirmé conduire les enquêtes pour toutes les recrues, le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Sabah Kadhim, a déclaré le 6 décembre dernier que 50 000 hommes « n’avaient toujours pas été confirmés (…). Et ce n’est pas seulement une question de loyauté ou de passé, nous ne savons pas s’ils travaillent ».
Il en va autrement pour les civils travaillant sur les bases américaines. Les conducteurs, les serveurs des mess et tous les autres employés sont passés au crible des enquêtes de moralités et des bases de données américaines, contenant les données criminelles et politiques de l’ancien régime, a déclaré le capitaine Darren Luke, un porte-parole de l’armée à Bagdad au Boston Globe. Les Irakiens reçoivent ensuite des cartes d’identité qu’ils doivent constamment porter sur eux et montrer régulièrement aux plantons américains. Ils sont également fouillés à leur entrée, afin de voir s’ils ne transportent pas d’explosifs et autres matériels létaux. Malgré cela, le commandement américain estime que leurs bases sont infiltrées ; des partisans portant des cartes d’identité sont parfois arrêtés.
L’attentat suicide contre la base de Mossoul, le 21 décembre dernier, est le fait d’un homme portant un uniforme de garde national irakien. Les enquêteurs sont d’accord pour dire qu’il avait pu se le procurer illégalement sur le marché local, où ils sont en vente. Selon le général Zebari, le kamikaze « n’était pas un membre de la garde nationale, car tous nos hommes stationnés dans la base sont présents. » Toutefois, le groupe qui a revendiqué cet attentat, Ansar al-Sunna, a indiqué que sa connaissance parfaite de la base était due à des informations de l’intérieur. D’autres attentats peuvent être imputé à cette « cinquième colonne » irakienne. Ainsi, le 23 octobre, la parfaitement planifié massacre de 50 cadets irakiens qui rentraient chez eux sans leurs armes d’exercice. Ou encore, les arrestations d’un commandant de la garde nationale de la province de Dyala, le lieutenant-général Talib al-Lahibi, accusé de liens avec la guérilla, en septembre, puis d’un colonel, Daham Abd, qui avait fourni des munitions, de l’agent et des informations à la guérilla de Kirkouk, en octobre. D’autres attaques encore contre les forces de sécurités, notamment lorsqu’elles sont recueillies lors d’une cérémonie ou d’autres événements et sont particulièrement vulnérables.

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