28.11.05

Euromed propose une «alliance des civilisations» contre le terrorisme

Méditerranée Le sommet de l'Union européenne et des pays méditerranéens s'est ouvert hier dans la métropole catalane.
Alain Barluet
[Le Figaro, 28 novembre 2005]

La lutte contre le terrorisme peut-elle contribuer à rapprocher les deux rives de la Méditerranée ? Cette question figure au centre du sommet qui réunit depuis hier soir à Barcelone les dirigeants de l'Union européenne et de dix États du pourtour méditerranéen engagés dans le processus Euromed (1). Dans une région où toute référence à la «guerre contre la terreur» chère à George W. Bush suscite des réactions épidermiques, l'enjeu n'est pas seulement sécuritaire. Dans cette perspective, la rencontre de Barcelone a officialisé hier une «alliance des civilisations» pour tenter de réduire la ligne de fracture culturelle et religieuse qui nourrit les rangs de l'islamisme radical.

Tolérance zéro

La Grande-Bretagne, qui préside le sommet, n'avait pas fait mystère de ses priorités en déclarant que le rendez-vous de Barcelone devait marquer «une date clé dans la lutte contre le terrorisme». Mais les Britanniques, particulièrement sensibilisés à la question depuis les attentats de Londres en juillet dernier, tenaient surtout au volet répressif. Le 9 novembre, les attentats suicides d'Amman (57 tués) sont encore venus rappeler la précarité des efforts entrepris depuis dix ans par les Européens et leurs partenaires du Sud pour mettre en place une «aire de paix et de stabilité», évoquée dans la déclaration de Barcelone du 28 novembre 1995.
Aujourd'hui, à l'issue de leur sommet, les 35 dirigeants d'Euromed proclameront donc une «tolérance zéro» à l'égard du terrorisme. Face à ce fléau, un «code de conduite» rédigé par les Britanniques appellera à mettre en oeuvre toutes les résolutions des Nations unies sur le terrorisme. Le document prônera également le renforcement de la coopération en matière de police et de justice et invite les pays du «processus de Barcelone» à échanger leurs informations sur les groupes terroristes et leurs réseaux de soutien.
Ce train de mesures n'a rien d'évident à mettre en place. D'une rive à l'autre de la Méditerranée, la définition même du terrorisme, brouillée par le conflit israélo-palestinien, diffère souvent. A la veille du sommet, le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, a ainsi affirmé qu'il ne fallait pas confondre le meurtre aveugle de «civils innocents» avec la «résistance à des forces d'occupation».
Pour les participants d'Euromed, ces divergences sont symptomatiques d'un possible «choc de civilisations». Un risque encore accru, pensent-ils, par la stratégie américaine de lutte contre le terrorisme dont plusieurs veulent résolument se démarquer. Hier après-midi, à l'initiative de José Luis Zapatero, les «35» ont consacré leurs premiers entretiens à l'«Alliance des civilisations» occidentale et musulmane contre le terrorisme. Lancée par le chef du gouvernement espagnol José Luis Zapatero après les attentats de Madrid du 11 mars 2004 et relayée par Kofi Annan, cette initiative a pour ambition d'«effacer les malentendus entre le monde occidental et l'islam».
Un groupe de travail à haut niveau a été créé en septembre dernier comprenant notamment l'ancien directeur général de l'Unesco Fédérico Mayor, le prix Nobel de la paix Desmond Tutu et l'ex-ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine. Il a tenu sa première réunion à Palma de Majorque, avant l'ouverture du sommet de Barcelone et rendra ses recommandations l'an prochain.

(1) Algérie, Autorité palestinienne, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Maroc, Syrie, Tunisie, Turquie.

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