
AFP/PETER HINZ-ROSIN
L'archéologue allemande Suzanne Osthoff, enlevée le 25 novembre 2005 dans le nord-ouest de l'Irak et libérée une semaine avant Noël (photo datée du 20 février 2004).
Il y a bien un "cas" Susanne Osthoff. Avant son enlèvement en Irak, le 25 novembre 2005, bien peu de gens, en Allemagne, connaissaient cette archéologue qui bravait le danger, dans un pays lointain, pour mener ses chantiers, tout en organisant des opérations de distribution de médicaments aux civils. Le mouvement de solidarité pour réclamer sa libération n'a rencontré qu'un faible écho outre-Rhin. Aujourd'hui, plus de quinze jours après sa libération, bon nombre d'Allemands se demandent qui est vraiment cette femme convertie à l'islam, pourquoi elle a été enlevée et comment est intervenue sa remise en liberté. Surtout, ils ne comprennent pas pourquoi leur compatriote tient tant à retourner dans le chaos irakien, en dépit des mises en garde de plus en plus insistantes.
Le visage aux yeux clairs de Susanne Osthoff, dont les mèches rebelles teintes au henné tombent d'un foulard noir, continue à s'afficher dans les journaux et sur les écrans de télévision allemands. Les médias alimentent le mystère autour de cette femme de 43 ans, qui n'a toujours pas remis les pieds dans son pays natal depuis sa libération, une semaine avant Noël. Elle avait alors fait savoir qu'elle ne souhaitait pas rentrer tout de suite en Allemagne, avec laquelle elle entretient, visiblement, une relation personnelle conflictuelle.
Il se dit que l'archéologue n'a pas encore téléphoné aux membres de sa famille, installée dans une petite commune de Bavière. Les intéressés, qui avaient tenté de mobiliser l'opinion publique, n'ont rien fait pour démentir. En revanche, Susanne Osthoff a passé du temps, vraisemblablement en Jordanie, avec la fille qu'elle a eue d'un Irakien dont elle est divorcée.
AVERTISSEMENTS MULTIPLES
La confusion a grandi, en Allemagne, après la récente diffusion de deux entretiens télévisés accordés par l'ex-otage. Alors qu'il paraissait probable que ses ravisseurs aient agi pour obtenir une rançon, sous couvert d'une revendication politique — l'arrêt de l'aide accordée par Berlin aux autorités de Bagdad —, elle a affirmé, sur la chaîne arabe Al-Jazira, que son enlèvement avait été "politique". Ses ravisseurs, qui l'ont bien traitée, selon elle, voulaient "obtenir de l'argent sous forme d'aide humanitaire".
Quelques jours plus tard, le 28 décembre, elle était apparue, le visage entièrement voilé à l'exception des yeux, pour répondre aux questions de la chaîne publique allemande ZDF. Elle avait affirmé, cette fois, au milieu de propos très confus, avoir été enlevée par la bande d'Abou Moussab Al-Zarkaoui, accusé d'être le chef du réseau Al-Qaida en Irak. Le fait est que des hommes soupçonnés d'en faire partie avaient tenté de l'enlever, en mai, dans le nord de l'Irak. Elle était restée dans le pays, en dépit d'avertissements multiples de l'ambassade d'Allemagne à Bagdad. Depuis qu'elle a fait savoir qu'elle entendait retourner en Irak, les autorités de Berlin ont du mal à dissimuler leur irritation et ont coupé toute aide financière à ses projets archéologiques.
Antoine Jacob (Berlin, correspondant)
Article paru dans l'édition du 03.01.06
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