9.3.08

Bush met son veto à un texte contre la torture

Après, on dira qu'on ne savait pas... La décision du président américain permet de facto à la CIA de recourir, contre des suspects de terrorisme, à des méthodes d'interrogatoire musclées.

Nouveau bras de fer entre George W. Bush et le Congrès. Le président américain a annoncé samedi avoir opposé son veto à un texte interdisant à la CIA de recourir à des méthodes d'interrogatoire. Elles avaient pourtant été dénoncées par leurs détracteurs comme de la torture ; la simulation de noyade était particulièrement visée. Le directeur de la Centrale du renseignement américain, Michael Hayden, avait admis pour la première fois début février que la CIA avait eu recours à la simulation de noyade sur trois suspects, dont Khaled Cheikh Mohammed, cerveau présumé des attentats du 11-Septembre, mais qu'elle ne l'avait plus utilisée depuis environ cinq ans.

Le Congrès, à majorité démocrate, avait ajouté en février une clause au financement des services de renseignement les contraignant à se conformer au manuel des règles d'interrogatoire imposées aux militaires, qui interdit les techniques traumatisantes. Mais le texte n'avait été approuvé que par une courte majorité du Sénat, rendant très improbable que le Congrès puisse surmonter le veto présidentiel et réunir les deux-tiers de voix nécessaires dans les deux chambres pour que le texte entre dans la loi sans la signature de Bush.

Le retour d'Al Qaïda dans la campagne ?

Pour se justifier, le président américain a ressortit dans son allocution radiophonique hebdomadaire l'argument d'Al Qaïda. selon lui, l'organisation terroriste «reste déterminé à attaquer de nouveau l'Amérique (...). Parce que le danger persiste, nous devons veiller à ce que nos services de renseignement aient les outils nécessaires pour arrêter les terroristes». Or, de son avis, le texte que le Congrès lui a soumis pour promulgation «réduirait ces outils essentiels».

De plus, il a assuré que la loi aurait sapé le programme confidentiel de détention et d'interrogatoire de la CIA, qui a permis de déjouer de nombreux attentats aux Etats-Unis et à l'étranger en collectant des informations «essentielles» grâce à des «techniques sûres et légales» appliquées à «un petit nombre des plus dangereux terroristes». Le manuel militaire a été conçu pour des combattants «légaux» capturés sur le champ de bataille, pas pour des terroristes «endurcis».

Une critique unanime

Sa décision, attendue, n'en a pas moins suscité des réactions virulentes. Le sénateur démocrate Edward Kennedy a ainsi estimé qu'il s'agissait de «l'un des actes les plus honteux de sa présidence. A moins que le Congrès ne surmonte le veto, il restera dans l'Histoire comme une insulte flagrante à l'Etat de droit et entachera gravement la réputation de l'Amérique aux yeux du monde». Tout en rappelant que la loi américaine interdisait déjà la torture, le président de la commission des Affaires juridiques au Sénat, Patrick Leahy, a estimé que Bush avait «encore manqué une occasion d'améliorer un bilan honteux (...) et d'envoyer un message positif au monde».

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