15.3.05

Irrédentisme chinois

L’adoption par le Parlement chinois de la loi antisécession, prévoyant le recours à la force si Taiwan déclarait son indépendance, a suscité la réprobation des Etats-Unis et de l'Union européenne. Il ne s’agit pourtant que d’une nouvelle péripétie du réveil de la Chine comme puissance géopolitique. Elle intervient quelques mois après la suggestion de levée de l’embargo sur les armes dont est l’objet Pékin depuis la répression sanglante du mouvement étudiant de 1989. L’ouverture de la Chine au marché occidental, et son décollage économique, a comme corollaire logique la volonté de maîtriser son espace. La question des îles, tant Spartley que Taiwan, est la suite de la politique de rétrocession des comptoirs britanniques et portugais de Hong Kong et Macao. Et le renouvellement de la menace faite à Taiwan ne fait que révéler les buts pan-nationaux de la Chine : 1) empêcher Taiwan de soutenir ou inciter les nouveaux mouvements de sécession sur le continent ; 2) éliminer la compétition taiwanaise sur l'exportation ; 3) affirmer le contrôle des îles Spratley et des autres réserves extraterritoriales pétrolières ; 4) éliminer une menace potentielle stratégique et être dans une meilleure position pour défendre la Chine contre des rivaux potentiels.
Face à ces velléités de grande puissance, les partenaires de la Chine adoptent une politique ambivalente. Les Etats-Unis, depuis 1972, affirment qu’il n’y a qu'une seule Chine et que Taiwan fait partie de la Chine. Mais cette politique a une traduction assez nuancée dans les faits, puisqu’en vertu du Taiwan Relations Act, adopté par le Congrès américain, Washington considère en allié l’île nationaliste et lui vend des armes. L’entrée en vigueur de cette loi antisécession peut venir à l’appui des thèses défendues par l’administration Bush auprès des pays de l’Union européenne pour les dissuader de reprendre les ventes d'armes à la Chine. Principale avocate de la levée de cet embargo, la France s’efforce de déconnecter les deux dossiers, tout comme la Commission européenne qui a souligné que les Européens n’avaient « aucunement l'intention » de modifier l'équilibre stratégique en Asie. Reste à connaître le jeu des Australiens qui ont fait connaître leur intention de ne pas suivre les Etats-Unis dans le cas d’une intervention militaire pour préserver l’indépendance de fait de Taiwan.

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