1.6.05

Le scandale qui secoue Israël

espionnage industriel

Jérusalem : de notre correspondant Patrick Saint-Paul
[Le Figaro, 01 juin 2005]

Au terme d’une enquête secrète baptisée «Course de chevaux», la police israélienne estime avoir mis au jour la «plus importante affaire d’espionnage industriel» de l’histoire d’Israël. La police a placé en détention plusieurs dirigeants de grandes entreprises israéliennes, qui ont siphonné des informations confidentielles dans les systèmes informatiques de leurs concurrents. Quelque 80 entreprises israéliennes seraient victimes du «cheval de Troie» informatique et la police affirme que le scandale a également des ramifications internationales.
Les enquêteurs ont découvert l’affaire par hasard en novembre 2004, lorsqu’un écrivain israélien a porté plainte après que des passages importants de son dernier roman, en cours d’écriture, eurent été diffusés sur Internet avant sa publication et sans son autorisation. Amnon Jacont a immédiatement soupçonné son ancien gendre, un informaticien chevronné, d’avoir piraté son ordinateur. En examinant le disque dur, la police a découvert que celui-ci avait été envahi par un «cheval de Troie». Le gendre, Michael Haephrati, qui résidait en Grande-Bretagne et en Allemagne, avait pris le contrôle de l’ordinateur à distance et pouvait consulter, supprimer ou déplacer tous les fichiers contenus dans le disque dur. Il a été arrêté à Londres par Interpol la semaine dernière.
Au fil de son enquête, la police a découvert que Michael Haephrati avait vendu son logiciel à trois sociétés de détectives privés en Israël. Celles-ci ont proposé des services «d’intelligence économique améliorée» à plus d’une vingtaine d’entreprises israéliennes. Ainsi le fournisseur de réseau télévisé câblé Yes aurait espionné son concurrent Hot. Les opérateurs de réseaux téléphoniques mobiles Cellcom et Pelephone auraient obtenu des informations confidentielles sur leur concurrent Partner. Meir Motors, importateur israélien de voitures Volvo et Honda a espionné Champion Motors, l’importateur Volkswagen.
La police affirme que certaines entreprises s’étant livrées à de l’espionnage industriel ont, elles-mêmes, été victimes d’agressions similaires. Les détectives installaient le virus dans l’ordinateur cible en envoyant des cédéroms contenant des offres promotionnelles ou des courriers électroniques aux secrétaires de dirigeants d’entreprises. Dès l’ouverture, le cheval de Troie s’installait automatiquement et n’était détectable par aucun système antivirus. Prenant le contrôle des ordinateurs à distance, les détectives pouvaient consulter à distance les fichiers secrets. Plusieurs dizaines de milliers de feuilles de salaires ont ainsi été consultées, des plans marketing, des campagnes de publicité, des offres de contrat, des projets de développement d’entreprises...
Une perquisition a été effectuée hier en Allemagne. L’appartement d’un Germano-Israélien qui est l’un des principaux suspects de l’affaire a été perquisitionné dans les environs de Freudenstadt, dans le sud-ouest de l’Allemagne. Selon la police israélienne, l’enquête en cours menée conjointement depuis six mois par Interpol, les polices des fraudes israélienne, britannique et allemande, pourrait en révéler une soixantaine.

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