22.12.04

Premier debriefing à la presse

LEMONDE.FR | 22.12.04 | 19h32  •  MIS A JOUR LE 22.12.04 | 22h03

Christian Chesnot et Georges Malbrunot, les deux journalistes français retenus en otage pendant quatre mois en Irak, sont arrivés à bord d'un avion spécial mercredi soir sur la base militaire de Villacoublay, près de Paris, où ils ont été accueillis par leurs proches et par le président Jacques Chirac.
Une demi-heure à peine après que l'avion qui les transportait a atterri sur la base militaire de Villacoublay, près de Paris, Christian Chesnot et Georges Malbrunot ont accordé une brève interview à la presse présente sur place. Auparavant, sur le tarmac, ils avaient embrassé leurs proches avant de serrer la main des responsables politiques et patrons de presse venus les accueillir. Rasés et souriants, ils ne semblaient pas en mauvaise santé.
"On a vécu une expérience difficile, parfois très difficile, a confié Georges Malbrunot. Mais on n'a pas perdu espoir ni confiance dans l'action des autorités françaises."
"On était deux, on a réussi à parler avec les ravisseurs en arabe, on a réussi à faire retomber la tension de temps à autre. Il n'y avait pas d'autre solution : quand vous êtes otages, il faut tenir et se dire que chaque jour qui passe vous rapproche de la fin. Il faut être très cartésien et humble."
Interrogé sur les conditions de leur libération, Georges Malbrunot a répondu : "La libération s'est bien passée, un peu inattendue [...]. On a été remis dans de bonnes conditions. Quand je suis sorti du coffre d'une Mercedes, quand j'ai vu à trois mètres l'écusson tricolore, je me suis dit : 'Ça sent la quille !'"

"CELA NE MÉRITE QUE LE MÉPRIS"

Christian Chesnot a ensuite rapporté qu'ils n'avaient pas été maltraités. Il a précisé qu'ils avaient été détenus dans cinq maisons, "d'abord dans une ferme" et que "c'était un peu spartiate". "On a compris qu'ils ne voulaient pas nous tuer tout de suite. On a engagé le dialogue."
M. Malbrunot reprend : "On a joué la carte 'journalistes français'. La France est contre la guerre, on comprend la résistance, on a donné des gages, on a montré qu'on n'était pas pro-américains. Ils ont fait leur travail de vérification.[...] Après ça s'est compliqué, il devait y avoir des divisions. On nous a dit au bout de six jours qu'on allait être libérés à la tombée de la nuit, on a attendu, on n'a pas été libérés."
Les deux journalistes ex-otages ont alors dénoncé avec virulence, devant leurs confrères présents à Villacoublay, le rôle joué par le député UMP Didier Julia, qui avait tenté une médiation officieuse en octobre, affirmant même être entré en contact avec les ravisseurs. Interrogé à ce propos, Georges Malbrunot a répliqué : "Je suis scandalisé par le comportement de la personne que vous citez, c'est jouer contre la vie de deux compatriotes. Cela ne mérite que le mépris", a-t-il déclaré, avant de fustiger des "mythomanes".
Christian Chesnot a aussi soulevé les difficultés de travailler en Irak : "Maintenant, l'Irak est devenu un endroit extrêmement dangereux, en province et dans Bagdad. On sait qu'il y a un journaliste italien [Enzo Baldoni] qui a été tué [en août], qui était dans la même ferme que nous."

"NEXT TIME... INCH ALLAH"

Après avoir répondu en anglais à plusieurs autres questions, Georges Malbrunot a mis un terme à l'entretien en lançant avec un sourire : "Next time... Inch allah" (Si Dieu le veut).
Les deux journalistes ont quitté peu après Villacoublay, pour être conduits par la DGSE, dans un lieu tenu secret pour un premier debriefing. Ils ne devraient rejoindre leur famille que jeudi.
Alors que les premières questions se profilent sur les circonstances exactes de cette libération surprise - qui a conduit M. Chirac à revenir en France alors qu'il venait d'arriver en vacances au Maroc - le premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, a affirmé qu'aucune rançon n'avait été demandée par les ravisseurs, qui n'avaient posé "aucune condition, exigence ou demande particulière".
Le président Chirac a estimé, quant à lui, au cours d'une allocution télévisée mercredi matin, que cette libération était due à "l'action responsable et tenace du gouvernement et de l'ensemble des services qui se sont mobilisés avec dévouement et efficacité". Après avoir remercié tous les responsables religieux et politiques qui en France et dans le monde ont œuvré à cette libération, M. Chirac a réaffirmé que la France "continuera à opposer une détermination sans faille à toutes les formes de terrorisme", félicitant la DGSE "pour la qualité" de son action.

Lemonde.fr avec AFP et Reuters

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