23.12.04

Un petit pays aux commandes de l’Europe

L’Europe a toujours eu comme moteur la France et l’Allemagne. Mais la véritable chance de ce couple a toujours été les trois petites nations du Benelux, les royaumes de Belgique et des Pays-bas, le grand-duché de Luxembourg. Dans les moments de crise de la construction européenne, ces petits pays ont souvent joué le rôle d'intermédiaire et de médiateur entre leurs grands voisins. Lorsque des petits pays s’attachent à régler un problème international, ils sont d’autant plus crédibles qu’ils n’ont pas de visée hégémonique en agissant ainsi. D’une certaine manière, ils ont sans doute aidé l’Europe à se doter d'une « culture de la médiation », en faisant avancer le dialogue au niveau du continent et dans le reste du monde. A l’inverse, pour ces petits pays, l’Europe leur offre l’opportunité de mener une politique étrangère qu’il ne pourrait se permettre s’ils étaient en dehors du processus communautaire. C’est particulièrement vrai pour le Luxembourg, qui va présider aux destinées européennes pour les six prochains mois. Bien connu pour être un « paradis fiscal », une place bancaire de premier ordre ou une plaque tournante pour les trafics en tous genres depuis l’Est du continent à destination de l’Union, le petit duché n’a jamais été aussi grand que dans l’Union.
« C’est dans un contexte spécifique que le Luxembourg assumera, du 1er janvier au 30 juin 2005, les Présidences de l’UE et de l’UEO: D’une part, l’année à venir marquera le début du processus de ratification du nouveau traité constitutionnel avec ses nouvelles dispositions pour approfondir l’Europe de la sécurité et de la défense. Pour mon pays, le processus engagé depuis le Conseil de Maastricht en 1991 en matière de politique européenne de sécurité et de défense doit aboutir à faire de l’Union européenne une institution politique complète dotée d’une capacité d’action crédible. D’autre part, la menace du terrorisme international exige des engagements fermes et des alliances efficaces de tous ceux qui oeuvrent pour la démocratie et la liberté. Enfin, par leurs effets internationaux, les crises régionales exigent aujourd’hui, plus que par le passé, des réponses collectives, des réponses européennes. »
Devant l’Assemblée parlementaire de l’Union de l’Europe occidentale, le ministre de la Défense, Luc Frieden, a plaidé le 29 novembre 2004 à Paris pour une stratégie européenne de sécurité intérieure et extérieure pour défendre la paix, la liberté, l’Etat de droit et la démocratie. Il a souligné dans son discours devant les députés que l’Europe doit disposer d’une véritable capacité d’action pour assurer, dans un esprit de solidarité et d’engagement pour les valeurs de liberté et de démocratie, ses propres responsabilités. Dans son intervention, le ministre Frieden a rappelé « l’importance que la présidence luxembourgeoise attache aux rapports avec les instances parlementaires » car « le débat est indispensable avec les députés qui représentent les citoyens ». « Il nous faudra chercher ensemble comment maintenir et approfondir le dialogue entre gouvernements et parlementaires nationaux ».
La sécurité du continent est indivisible. La stabilité et la paix, même hors de la périphérie immédiate de l’Europe, assurent sa sécurité de façon directe et substantielle. Ce qui se passe dans les Balkans, en Ukraine, au Proche-Orient, en Afghanistan ou ailleurs a aujourd’hui des conséquences directes sur la sécurité intérieure et la stabilité continentale. L’Union a assisté au cours des dernières années à une globalisation ou mondialisation de l’instabilité. Il s’agit dès lors de perfectionner les nouveaux éléments constitutifs de la politique européenne de sécurité et de défense.
La politique étrangère commune fonde son autorité sur l’existence de moyens d’intervention militaire rapides et crédibles. La future Présidence luxembourgeoise s’appliquera à renforcer les aspects opérationnels, à la fois militaires et civils de la politique européenne de sécurité et de défense et à mettre en œuvre une stratégie pour combler les lacunes capacitaires. Le ministre Frieden a également souligné que la future Présidence luxembourgeoise attachera une importance particulière à la lutte contre le terrorisme en veillant à coordonner sans cesse la politique extérieure de sécurité de l’Union et les politiques menées dans le domaine de la justice et de sécurité intérieure. « Le plus grand défi sera de contribuer à perfectionner les nouveaux éléments constitutifs de la PESD dans une approche intégrée, en tirant le meilleur bénéfice des structures existantes », a ajouté M. Frieden en évoquant notamment la nécessité de « développer les capacités militaires » sur la base « de critères précis et mesurables comme la mobilité stratégique, la déployabilité, l’interopérabilité et la durabilité ».
Luc Frieden a encore souligné qu’il attache une grande importance à une analyse et une stratégie communes entre les Etats-Unis et l’Europe dans les questions de sécurité, d’autant que le président George W. Bush entamera son second mandat en janvier. Pour le ministre luxembourgeois de la Défense, dans la gestion des conflits, l’OTAN reste la pierre angulaire du dispositif transatlantique et l’Union de l’Europe occidentale l’expression de la défense européenne, tant que le traité constitutionnel ne sera pas entré en vigueur. La politique européenne de sécurité et de défense n’est pas destinée à se substituer à l’OTAN. Elle est orientée vers le renforcement de la communauté transatlantique. Mais pour que la voix de l’Europe soit entendue, il faut que l’Europe exprime une opinion commune, unique en matière de politique étrangère et de sécurité, a encore souligné le ministre luxembourgeois de la Défense devant les députés.

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