24.1.05

Silence dans les rangs…

L’épisode d’hier soir du JAG appelle encore une fois un commentaire, tant il est marqué par l’actualité militaire américaine et porte un message « stratégique ». L’histoire, en deux mots, tourne autour des propos du général Watson, chef d’un groupe mixte américaino-irakien de contre-guérilla, responsable de l’arrestation de Saddam Hussein. Lors de sa présentation par le secrétaire à la Marine, une journaliste l’accuse d’avoir dénigré, dans un sermon, l’islam et d’avoir proclamé que le combat pour la démocratie du président Bush était une croisade contre le diable, dont la manifestation physique était les musulmans. Au passage, il avait qualifié l’islam de « religion de seconde classe ». Traduit en cour martiale, il est finalement acquitté ; sans remettre en cause le verdict des jurés, le président du tribunal prend toutefois la parole pour rappeler que l’armée n’a nullement besoin, aujourd’hui plus que jamais, de références religieuses et appelait tout un chacun a conserver ses convictions pour lui. L’épisode est passé aux Etats-Unis le 30 avril 2004 (« Fighting Words »).
La question militaire traitée dans cet épisode concerne évidemment la liberté de parole des soldats. Personne ne voyait d’un mauvais œil que le général s’exprimât dans une église, mais il n’était pas normal qu’il le fît en uniforme, engageant indirectement l’armée. Par ailleurs, ces discours n’avaient pas été revus par les Affaires publiques, le corps américain dédié aux relations publiques des armées. La question politique tenait au rôle joué par les médias. Encore que la série ait toujours présenté des journalistes plutôt polémistes, il est intéressant de voir la presse dévoiler un fait qui met en porte-à-faux l’effort diplomatique américain, en jouant sur ses contradictions. Il s’agit là de montrer clairement que les médias en sont revenu à leur position de gardien de la démocratie (watchdog), après s’être rallié au drapeau dès le 11 septembre 2001.
Car c’est bien de démocratie que parle cet épisode ! La série étant destinée à un public américain, avant d’être exporté, elle tient un discours à destination une opinion publique en pleine année électorale. La question de la religion a été un élément-clé de la campagne du président Bush. « Fighting Words » ne remet pas en cause les croyances de chef de l’Etat, mais il en marque les limites. Le combat engagé contre l’Irak est celui de la démocratie, comme en 1942. Il n’est en rien une croisade contre l’islam. A mesure où rentrent clandestinement les cadavres des soldats tués en Irak, il convenait pour le Pentagone, qui revoit les scripts (qui peut donc les suggérer aussi), de bien dissocier les combats et leur portée idéologique supposée.
Et de bien faire comprendre que les propos des militaires, même s’ils sont officiers généraux, restent privés et n’engagent nullement l’institution. Par ailleurs, en raison de la gravité des événements, ils doivent éviter de proférer des opinions allant à l’encontre de la politique gouvernementale. Voilà pourquoi la liberté de parole des militaires doit être encadrée… Un manière d’éviter la multiplication de révélations du type Abu Ghraib. L’avertissement tombait à propos, puisque les photos des actions du caporal Graner et des acolytes n’allait pas tarder à être rendues publiques.

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