17.2.05

L'administration américaine craint une "nouvelle attaque" terroriste aux Etats-Unis

LE MONDE | 17.02.05 | 13h55

Selon M. Rumsfeld, des réseaux seraient en train de se "regrouper" pour préparer un attentat.

New York de notre correspondant

"C'est seulement une question de temps avant qu'Al-Qaida ou d'autres groupes tentent d'utiliser des armes chimiques, biologiques, radiologiques ou nucléaires" : ces propos alarmistes ont été tenus, mercredi 16 février, par le nouveau directeur de l'Agence centrale de renseignement (CIA) américaine, Porter Goss, devant la commission des renseignements du Sénat américain, lors de l'audition annuelle sur "les menaces au niveau mondial".
Le réseau d'Oussama Ben Laden reste la première crainte des Etats-Unis. Il tente "de trouver des moyens de contourner les mesures de sécurité renforcées pour frapper les Américains sur le territoire américain", a affirmé M. Goss, ancien agent et ancien parlementaire républicain nommé par George Bush, il y a cinq mois à la tête de la CIA. La détermination d'Al-Qaida "à détruire l'Amérique n'a pas faibli", a affirmé, à son tour, Robert Mueller, le directeur du FBI (police fédérale). M. Mueller a mis en garde contre le danger représenté par des islamistes radicaux en sommeil sur le sol des Etats-Unis depuis des années et attendant l'ordre de lancer une attaque.
Le secrétaire à la défense, Donald Rumsfeld, a tenu des propos aussi inquiets devant la commission des forces armées de la Chambre des représentants. Les réseaux terroristes "se regroupent pour effectuer une nouvelle attaque", a-t-il déclaré.
Parmi les autres menaces, l'Iran figure en bonne place, selon le numéro un des services de renseignement militaires (Defense Intelligence Agency), le vice-amiral Lowell Jacoby. D'après lui, Téhéran continuera à soutenir le terrorisme et les insurgés en Irak tant que son objectif de chasser les Etats-Unis de la région ne sera pas atteint.
Sur la Corée du Nord et ses armes atomiques, le vice-amiral considère qu'elles sont, aux yeux de Pyongyang, cruciales "pour dissuader les Etats-Unis et la Corée du Sud d'intervenir". En conséquence, il est "peu vraisemblable" que Kim Jong-il "abandonne toutes ses capacités nucléaires". Il a souligné également que la Corée du Nord continue à "développer, à produire et à déployer des missiles balistiques d'une portée et d'une sophistication incroyables".
Pour autant, le risque d'une attaque contre le Sud est jugé limité car plus d'une décennie de situation économique catastrophique "a dégradé significativement" les capacités militaires de la Corée du Nord. Lowell Jacoby a enfin exprimé sa préoccupation devant l'effort militaire grandissant de la Chine, notamment en matière de missiles et sur "sa politique plus ferme" à l'égard de Taïwan.
Concernant l'Irak, le directeur de la CIA a reconnu, pour la première fois, que la guerre a offert "une cause aux extrémistes islamiques". "Ils exploitent le conflit irakien afin de recruter des djihadistes antiaméricains. Ceux qui survivront quitteront l'Irak avec de l'expérience." Les combattants sur place représentent "un réservoir potentiel de contacts" pour construire des réseaux internationaux à l'image de l'Afghanistan après le conflit contre l'armée soviétique.
M. Goss a ajouté que l'objectif d'Abou Moussab Al-Zarkaoui, allié d'Al-Qaida et considéré comme le chef principal du terrorisme islamique en Irak, est d'établir au cœur du pays une zone échappant à tout autre contrôle que le sien. Il a enfin affirmé qu'Al-Qaida est "un adversaire patient, obstiné, imaginatif, souple et dangereux mais vulnérable".
Plusieurs parlementaires démocrates ont critiqué, par ailleurs, la lenteur de l'administration à nommer le directeur du renseignement. Ce nouveau poste a été créé pendant l'été 2004, à la demande de la commission d'enquête sur les attentats du 11 septembre 2001, pour superviser et coordonner les quinze agences fédérales travaillant dans le domaine du renseignement. Mais le candidat idéal semble difficile à trouver. La reprise en main de l'Agence par M. Goss se passe mal. Les démissions d'agents chevronnés se succèdent, comme les critiques contre M. Goss. Pendant ce temps, le Pentagone, sous l'impulsion de Donald Rumsfeld, construit son propre réseau de renseignement.

Eric Leser
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 18.02.05

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