21.2.05

L'IRA en odeur de casse en Irlande du Nord

L'énorme braquage de décembre à Belfast est attribué à la branche armée de Sinn Féin.
Par Armelle THORAVAL

lundi 21 février 2005 (Liberation - 06:00)

Londres de notre correspondante

En Irlande du Nord, la crise couve dans le camp républicain catholique. Début décembre, Gerry Adams, leader de Sinn Féin (parti républicain catholique, proche de l'IRA), paraissait sur le point de faire repartir le processus de paix et de partager le pouvoir avec les protestants unionistes. Mais l'énorme braquage commis le 20 décembre dans les locaux de la Northern Bank, à Belfast, où 26 millions de livres (38 millions d'euros) ont été volés, a changé la donne. Imputé à l'IRA, ce casse a donné un coup d'arrêt aux négociations. Découvertes en fin de semaine dernière, des opérations de blanchiment d'argent ont encore aggravé la situation. Dermot Ahern, le ministre des Affaires étrangères d'Irlande a demandé hier à Sinn Féin «d'assumer ses responsabilités» pour franchir ce mauvais cap, affirmant que «les cambriolages et le blanchiment d'argent n'ont pas de place dans la société irlandaise».
L'affaire risque de rebondir demain, quand Paul Murphy, le ministre britannique à l'Irlande du Nord s'exprimera à la Chambre des communes sur les conclusions du rapport de la commission indépendante, installée en 2004 par les gouvernements britannique et irlandais pour surveiller les activités paramilitaires dans l'île. La commission met au compte de l'Armée républicaine irlandaise, l'IRA, la responsabilité de ce vol spectaculaire et plaide pour des sanctions financières à l'encontre des responsables de Sinn Féin.
Perquisitions. Paul Murphy aura aussi en main le résultat des opérations déclenchées la semaine dernière par la Garda, la police irlandaise, qui a mené perquisitions et gardes à vue à Cork. Elle a notamment trouvé près de 2,3 millions de livres en billets chez un homme d'affaires lié à un ancien vice-président de Sinn Féin, Phil Flynn. Huit personnes ont été arrêtées, dont un cuisinier soupçonné de blanchir de l'argent pour l'IRA. Il a été inculpé, tandis que les autres interpellés ont été relâchés. Pour l'instant, le lien entre l'argent retrouvé et le braquage n'a pas été établi.
Pied de nez ou diversion, Les enquêteurs ont en revanche retrouvé d'autres billets, bien liés ceux-là au hold-up : 50 000 livres étaient dissimulées dans un club de sport de Belfast, réservé à la police... Gerry Adams interprète cette enquête comme une campagne visant à détruire son parti. Rentré précipitamment d'Espagne, il a estimé samedi qu'il s'agissait d'un «procès des médias» et nié toute implication de l'IRA.

Crise du silence.

Sinn Féin et l'IRA ont un autre front à gérer, plus local, mais douloureux. Le 30 janvier, Robert Mc Cartney, 33 ans, et un ami vont boire une bière au Magennis's bar, au centre de Belfast, haut lieu de réunion de l'IRA. Très vite le ton monte, dans des circonstances peu claires. Le pub est bondé. Mc Cartney sera retrouvé sur le trottoir, mort, un couteau planté dans l'artère coronaire. Son copain est en piteux état, mais survit. Les cinq soeurs de Mc Cartney et la mère de ses deux enfants accusent l'IRA d'avoir couvert la fuite du meurtrier. Face à la révolte, l'IRA a fini par encourager ceux qui peuvent «aider la famille» à le faire. Mais pour Robin Livingstone, auteur d'une tribune dans le Guardian et directeur d'un journal ardemment républicain, cette crise du silence serait pire que la précédente.

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