23.2.05

Sale temps aux Nations unies

Il était une fois une grande nation qui voulait aller faire la guerre à ses voisins avec la bénédiction d’une instance supérieure. Comme cette dernière se refusait à accéder à cette demande, la guerre eut lieu et la grande nation décida de se venger.
Cette introduction totalement imaginaire et, surtout, inimaginable dans ce monde épris de liberté et de démocratie qui est le nôtre, reflète pourtant la triste réalité de l’offensive américaine contre les Nations unies. On se souvient qu’aux premiers jours de la guerre du Golfe, les services de presse de l’organisation internationale avaient révélé que micros avaient été retrouvés dans les locaux new-yorkais. Puis, ce furent les attaques contre Mohammed el-Baradei, dont le second mandat de directeur général de l’International Atomic Energy Agency arrive à terme dans quelques semaines. Pour Washington, il est hors de question qu’il se succède encore une fois à lui-même. Le dossier iranien, dans lequel l’Europe est partie prenante, est l’objet du casus belli. En arrière-plan de la querelle, il y a évidemment l’impossibilité pour l’agence des Nations unies de trouver les armes de destruction massive que les guerriers de l’information américains clamaient avoir trouvé dans les rapports des services de renseignement, pour la plupart réécriture de dossiers vieux d’une dizaine d’années…
Ensuite, la charge fut lancée, toujours par les Etats-Unis, contre la gestion des Nations unies du programme « Pétrole contre nourriture » avec l’Irak de Saddam Hussein depuis l’embargo de 1991. Le fils de Kofi Annan, Kojo, a été mis en accusation dans les médias américains, donc mondiaux, jusqu’à ce que le rapport de la commission d’enquête menée par Paul Volker, l’ancien directeur de la Federal Reserve américaine, mette en lumière le rôle de l’ancien directeur du programme, Benon Sevan. Aujourd’hui, la cible est Ruud Lubbers, chef du Haut-Commissariat pour les réfugiés, acculé à la démission suite à des accusations de harcèlement sexuel.
Le fait que l’accusatrice soit américaine ne semble pas indiquer qu’il y ait complot. Mais il est troublant de voir autant d’« affaires » révélées depuis quelques mois par le même accusateur, l’administration Bush. Surtout si l’on rappelle que le président est adepte des théories en vogue aux Etats-Unis, diffusées par les franges les plus conservatrices des mouvements chrétiens, selon lesquelles les Nations unies sont les principaux ennemis de la première puissance mondiale. Les grands-mères du fin fond de l’Ohio, si chères à Jean-Claude Junkers, en sont intimement persuadés depuis longtemps… Il est vrai que l’autre, à égalité, est le gouvernement fédéral.

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