1.3.05

Florence Aubenas appelle à l'aide dans une vidéo

La journaliste de Libération Florence Aubenas, disparue à Bagdad le 5 janvier avec son guide irakien, est apparue mardi en vie mais très éprouvée dans une cassette vidéo, où elle lance un appel au secours.

(Avec AFP.)
[LE FIGARO,01 mars 2005]

Après 55 jours de silence, il s'agit du premier signe de vie concret, officiel, de la journaliste.
Le visage amaigri et les cheveux tombant dans les yeux, Florence Aubenas, 43 ans, lance dans cet enregistrement un appel insistant à Didier Julia, le député UMP auteur d'une vaine équipée pour libérer deux journalistes français, Christian Chesnot et Georges Malbrunot, libérés le 21 décembre après quatre mois de captivité en Irak.
«Mon nom est Florence Aubenas. Je suis journaliste française. Je suis journaliste de Libération. Je suis en mauvaise santé et je suis en mauvaise santé psychologique aussi», explique en anglais la journaliste, grand reporter, dans cette cassette diffusée par la chaine Sky-Italia.
«Je lance un appel au député français Didier Julia. S'il vous plaît M. Julia, aidez-moi. C'est urgent, aidez-moi», ajoute-t-elle.
Aucune revendication n'a accompagné cette vidéo ni le nom du groupe qui la détient. Par ailleurs, aucune mention n'est faite dans ce document vidéo de son guide, Hussein Hanoun Al Saadi.
L'entourage du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a aussitôt déclaré qu'il n'y avait «toujours aucune revendication, ni aucun contact direct validé avec les gens qui la détiendraient».
Matignon a également fait savoir qu'une autre cassette avait déjà été «montrée jeudi dernier» à la famille de la journaliste, dans laquelle la jeune femme s'exprimait également en anglais mais où elle ne faisait «aucune mention» de M. Julia.
«Nous vérifions si (cette cassette) est antérieure ou postérieure», a-t-on ajouté en précisant qu'un travail d'expertise était en cours, comme l'a confirmé, à Londres, le ministre des Affaires étrangères Michel Barnier.
Presque aussitôt après la diffusion de la cassette, Didier Julia a demandé à l'Etat de lui rendre sa «liberté d'action», perdue à la suite de sa mise en cause dans la précédente affaire des otages français en Irak.
Joint par téléphone, il a déclaré avoir été «catastrophé» quand il a «entendu cet appel à l'aide», parce qu'à «la demande d'un ministre, (ses) collaborateurs sont mis en examen avec contrôle judiciaire» et que lui-même est «dans l'attente d'une convocation du juge (Jean-Louis) Bruguière pour être mis en examen». «Je suis dans une situation où je suis paralysé».
Après un entretien avec Jean-Pierre Raffarin, le président du groupe UMP à l'Assemblée, Bernard Accoyer, a indiqué mardi que «le gouvernement et le président de la commission des Affaires étrangères Edouard Balladur ont fait savoir à Didier Julia qu'il n'était pas souhaitable» qu'il agisse dans le cadre de la disparition de Florence Aubenas.
«Cette affaire prend une dimension très grave», a-t-il ajouté, en soulignant qu'il ne s'agissait «pas de la même situation» que pour les ex-otages Christian Chesnot et Georges Malbrunot.
Le patron de Libération Serge July s'est de son côté dit «bouleversé» après avoir vu la cassette qui, selon lui, ne fait pas de M. Julia «un interlocuteur légitime». Le responsable de Reporters sans frontières, Robert Ménard, a lui jugé qu'on «ne peut pas imaginer que le nom de Julia ne lui a pas été dicté (à Florence Aubenas) par les ravisseurs».
Le 6 janvier, Libération avait annoncé être sans nouvelles de Florence Aubenas, arrivée en Irak le 16 décembre 2004, ainsi que de son guide.
Depuis, en dépit d'une mobilisation constante en France dans l'opinion, la classe politique et les médias, aucun signe de vie n'avait été donné concernant la journaliste et son guide.
Ce silence étonnant avait alimenté l'hypothèse d'un enlèvement crapuleux, les plus pessimistes se demandant si elle était toujours en vie.

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