16.6.05

Retour sur l’opération stay-behind irakienne

La mythologie al-qaïdienne a servi aux autorités américaines à cacher la nature exacte de la guérilla irakienne. Admettre qu’il s’agissait d’une opération stay-behind signifiait pour les planificateurs américains devoir faire face à une occupation/pacification de l’Irak plus difficile que celle prévue par les faucons néo-cons.
Or, les enlèvements troublants des journalistes français et roumains laissent apparaître un pan de cette organisation, celle du financement. En effet, pour obtenir leur libération, la France et la Roumanie ont réactivé leurs connaissances de l’ancien régime irakienne et, selon toutes vraisemblances, les otages ont été retenus dans les mêmes sous-sols. Les « taupes » arabes, recrutées par la Securitate lors de leurs formations en Roumanie ont été réactivées par le président Traian Basescu lors de la crise des otages. Cette information a été confirmée à l’AFP par un expert proche des services de renseignement, selon lequel « les anciens étudiants n’ont dans un premier temps pas réagi » aux signaux des autorités roumaines, en quête d’un « canal de communication » avec les ravisseurs des trois journalistes, Marie-Jeanne Ion, Sorin Miscoci et Eduard Ohanesian. « La décision a alors été prise d’identifier l’agent qui avait recruté chacun de ces ex-étudiants afin que les vieux réseaux soient réveillés. Cette mesure a aussitôt porté ses fruits et à partir de ce moment-là nous avons commencé à obtenir des informations ». Selon cet expert, l’un des renseignements a permis à Bucarest d’apprendre que Florence Aubenas, la journaliste du quotidien français Libération, et son guide Hussein Hanoun, étaient détenus au même endroit que les Roumains.
A Paris, les pistes sont semblables. Elles sont même plus que jamais d’actualité avec la résurgence des réseaux Julia. Lors de sa conférence de presse, Florence Aubenas a déclaré que le chef de ses geôliers, se présentant comme « le boss » puis comme « al Hadj », lui avait affirmé avoir parlé « deux fois directement au téléphone avec M. Julia ». L’hebdomadaire Le Point, qui sort aujourd’hui, identifie les deux acolytes du député, « K » et « J ». Il s’agirait de Karim Guellaty, un Franco-Tunisien aux multiples facettes, auteur d’ouvrages spécialisés sur l’informatique et d’un Que sais-je ? sur le droit musulman, en collaboration avec Frédéric-Jérôme Pansier, et de Khaled Jassem, « un marchand de légumes franco-irakien » qui « jouirait d’excellents contacts familiaux dans les milieux militaires irakiens ». Le commentaire de Didier Julia est important : « Un de ses frères, c’est vrai, est général en chef dans l’armée irakienne actuelle. » Selon l’enquête de Libération,, « J » aurait proposé au journal d’«acheter» pour 50 000 dollars la cassette vidéo diffusée le 1er mars, dans laquelle Florence Aubenas fait appel à Didier Julia.
Ces anciens ba’asistes ouvrent ainsi sur une opération concertée où le financement de la guérilla, moins sunnite que largement dévouée au parti Ba’as, se fait par le biais des enlèvements. L’épuisement du milliard de dollars retiré de la Banque centrale irakienne serait ainsi responsable de la mise sur la touche d’al Zarqawi. Et en arrière-plan des caves à otages irakiennes, en dépit d’une absence de preuves, apparaît toujours Damas, soupçonnée d’avoir joué un rôle équivoque dans l’enlèvement de la journaliste française et de son accompagnateur irakien.

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