23.8.05

La fin de la colonisation de Gaza

Netzarim a été évacuée. La dernière, mais de loin la plus symbolique des colonies israéliennes de la bande de Gaza, a été évacuée. Ainsi s’achèvent trente-sept ans de sionisme… Des milliers de morts pour une bande de terre sur-occupée par des familles pléthoriques qui se faisaient concurrence, les uns par pauvreté, les autres par idéologie, craignant l’arme démographique des premiers. Gaza, tout autant que la Cisjordanie, est chargée de tout les maux dont souffre la relation entre Palestiniens et Israéliens depuis 1947 : le sionisme, le terrorisme, la peur, l’incompréhension, l’iniquité…
Pour comprendre cette évacuation, nul besoin de remonter à la Shoah, les étoiles jaunes prenant une couleur orange au gré de la mode, montrant quelque part le sort fait dans les mémoires à cet événement tragique de l’Histoire : un instrument de victimisation que l’on souhaite imparable, comme l’était le loup dans d’autres systèmes culturels. L’évacuation de Gaza n’est pas un prélude au retrait israélien de tous les territoires issus de l’occupation de 1967. La résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations unies n’est pas à l’ordre du jour. Il s’agit seulement d’un repli stratégique sur une ligne qui est politiquement acceptable par la majorité des Israéliens. Le constat était basique : la plupart des attentats de la seconde Intifada avaient lieu à proximité des colonies ; la plupart des morts, militaires et civils, israéliens également. Militairement, la ligne de front était intenable, imposant la rotation d’hommes et de femmes soumis à une intense tension psychologique, permettant la multiplication des incidents difficilement soutenable devant les lois militaires autant que l’opinion publique internationale. Politiquement, l’électorat le plus conservateur se trouvait dans ces colonies, tenant un discours aux limites du racisme.
Avant Oslo, cette situation pouvait passer. Depuis, la paix paraît possible. Or, le maintien des colonies est incompatible avec l’idée de paix. Quant aux opérations d’information (« les Palestiniens sont des terroristes », « Arafat sponsorise le terrorisme, c’est pourquoi il ne lutte pas contre »…), elles ne permettent pas encore de gagner une guerre. Surtout si la cible, en l’occurrence Arafat, décède entre temps. La manœuvre étant théorisée depuis Clausewitz comme la seule alternative militaire, il ne restait plus que l’évacuation des quelque huit mille colons pour trouver une sortie honorable. La Cisjordanie sera-t-elle évacuée au-delà des quatre colonies déjà prévues, comme le craignent certains israéliens orthodoxes ? Probablement pas, le mur et la concentration coloniales, notamment avec un redéploiement autour de Jérusalem afin de bien l’inclure dans le territoire israélien, devraient assurer leur sécurité dans un environnement largement monochrome, c’est-à-dire sans Palestinien.
Il est important de comprendre que la colonisation en Israël est devenu une réalité politique, plutôt que territoriale. Eretz Israël a depuis longtemps atteint ses objectifs réalisables, et l’occupation de Gaza et de la Cisjordanie ne se justifie selon des impératifs de sécurité. Les voisins arabes ont enregistré l’existence de cet Etat, certains le reconnaissent diplomatiquement ; on peut seulement regretter qu’ils ne soient pas plus nombreux, mais ni la Syrie, ni le Liban, ni l’Arabie saoudite n’ont de velléités, et encore moins les moyens, d’une nouvelle conflagration avec Israël. Par contre, les colonies sont devenues des foyers d’insécurité, à force de traitement discriminatoire à l’égard de la population palestinienne. Cette situation n’avait rien à voir avec du racisme, comme on l’entend généralement, mais correspondait à une négation politique du fait palestinien et à une volonté de purification d’une terre considérée comme appartenant originellement au peuple juif. Heureusement, les réalités stratégiques du XXIe siècle semblent s’imposer en Israël. Il est à espérer que le tandem Sharon-Peres ne se fera pas dépasser par l’ineffable Bibi Netanyahou, et que Mahmud Abbas trouvera les moyens de sa politique.

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