20.1.06

Révélations en série sur Ben Laden l’insaisissable [08-12-05]

Terrorisme Toujours insaisissable, l’organisateur des attentats du 11 septembre 2001 fait l’objet de nouvelles révélations dans la presse américaine.
Par Guillemette Faure
[Le Figaro, 19 janvier 2006]

OUSSAMA BEN LADEN avait confié à son garde du corps un pistolet chargé de deux balles qu’il nettoyait tous les soirs. L’homme devait l’éliminer s’il se faisait arrêter par les Américains. C’est ce qu’affirme Peter Bergen, l’analyste des questions de terrorisme de la chaîne CNN, dans un livre à venir (*) dont le magazine Vanity Fair publie des extraits sous forme de témoignages.
L’ex-garde du corps, Abou Jandal, explique qu’il devait vider son arme « au cas où nous aurions été encerclés, ou au cas où il risquait de tomber entre des mains ennemies, afin qu’il ne fût pas capturé vivant ». Peter Bergen, qui a rencontré Ben Laden en 1997, souligne que le chef d’al-Qaida était un « virulent adversaire » de cet athée de Saddam Hussein depuis l’invasion du Koweït en 1990. Ben Laden aurait voulu libérer l’émirat avec des moudjahidins, sans le recours aux Américains.
Le Pakistanais Hamid Mir, biographe de Ben Laden, confie que, lorsque le chef d’al-Qaida lui parlait de ce « fils de pute socialiste » de Saddam Hussein, il employait un langage tellement fleuri que « ça m’était difficile d’écrire ». Ces affirmations contredisent la communication de la Maison-Blanche, qui, dès 2002, citait la connivence entre ses deux ennemis pour justifier l’entrée en guerre contre l’Irak.

Anecdotes sur l’adolescent

Autre grain de sable dans la version officielle américaine, Peter Bergen assure que, au moment de la chute des talibans en décembre 2001, Ben Laden se trouvait bien à portée de main des Américains, dans la région de Tora Bora, dans l’est de l’Afghanistan. Le reste de l’article est riche en anecdotes. On apprend que Ben Laden regardait l’émission de Larry King sur CNN ou faisait pousser de gros tournesols en Afghanistan en affirmant : « Je les bats (les Américains) même en agriculture. »
Un autre magazine américain, le New Yorker, publie un article sur l’enfance du patron d’al-Qaida. Il relate ses années au lycée al-Thagher de Djeddah en Arabie saoudite, où Ben Laden a vécu son « prélude intellectuel ». C’est dans les dortoirs de cet établissement pour fils de bonne famille qu’au début des années 70 il aurait été initié à l’islam par un professeur de sport syrien.
Ce dernier récompensait ses recrues en leur donnant le droit d’aller jouer au foot dès qu’elles avaient mémorisé quelques versets du Coran. Là, un petit groupe de lycéens s’est soudé, devenant progressivement plus militant. Influencés par les Frères musulmans, les jeunes se laissaient pousser la barbe et cherchaient à convaincre leurs camarades de classe de la nécessité d’instaurer la charia, la loi islamique, à travers le monde arabe.
Oussama Ben Laden ne s’est plus manifesté depuis un message qui lui avait été attribué, le 27 décembre 2004, et dans lequel il désignait Abou Moussab al-Zarqaoui à la tête d’al-Qaida en Irak. Hier, la télévision qatarienne al-Jezira a diffusé une vidéo dans laquelle le numéro deux du groupe terroriste, Ayman al-Zawahiri, affirme que Ben Laden est toujours vivant et qu’il poursuit sa guerre sainte contre l’Occident. La chaîne a ensuite reconnu que la vidéo datait en fait du mois de septembre.
L’été dernier, Porter Goss, le patron de la CIA, assurait savoir où Ben Laden se trouvait. Il a renchéri la semaine dernière, affirmant à la télévision que la CIA en savait beaucoup plus que ce qu’elle pouvait révéler, tandis que le chef de file des démocrates au Sénat, Harry Reid laissait entendre que Ben Laden était peut-être mort dans les tremblements de terre du Pakistan. S’il continue à faire couler de l’encre dans la presse américaine, l’organisateur des attentats du 11 septembre 2001 reste toujours insaisissable.

* The Osama bin Laden I Know : An Oral History, Free Press Editions, janvier 2006.

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