1.8.07

De Licorne à la Finul, l'armée française réexamine ses opérations extérieures

ARNAUD DE LA GRANGE.

Publié le 31 juillet 2007
Actualisé le 31 juillet 2007 : 07h33

Les interventions militaires françaises dans le monde coûtent 600 millions d'euros par an, dont plus du tiers pour l'opération Licorne.

EN CÔTE D'IVOIRE, les temps sont à la décrue militaire française. Lente mais régulière - on en est aujourd'hui à 2 900 soldats, contre 5 000 fin 2004 -, elle devrait se poursuivre, sous réserve que le processus de paix ne sorte pas à nouveau de son lit. L'attentat contre Guillaume Soro, il y a un peu plus d'un mois, a ainsi donné des sueurs froides aux généraux français. Sans fixer de calendrier, Paris souhaite continuer à réduire la voilure de l'opération Licorne.

Aujourd'hui, quelque 12 000 soldats français sont engagés sur les théâtres d'opérations extérieures (Opex). Dans un entretien publié hier par La Croix, le ministre de la Défense affirme que la diminution des effectifs en Opex n'est « pas à l'ordre du jour ». Dans le cadre de la « mise à plat demandée par le président de la République, précise Hervé Morin, chaque situation a été examinée ». Il a ajouté que le niveau des forces prépositionnées en Afrique ou outre-mer (22 000 hommes) serait réexaminé lors de la rédaction du Livre blanc début 2008.

La veille du 14 juillet, Nicolas Sarkozy avait déclaré qu'il avait en la matière une « règle simple » : « Chaque soldat français engagé en opération le sera de manière utile, au service d'une cause légitime, pour mettre en oeuvre une politique lisible. » Plusieurs raisons motivent le réexamen des Opex. Les armées tirent un peu la langue, d'abord. Plus que les effectifs, c'est le nombre d'opérations qui pose problème, par la multiplication des systèmes de commandement et de communications qu'elles supposent. Il y a aussi le coût, avec 600 millions d'euros par an, dont 250 pour la seule Côte d'Ivoire.

Contrôle parlementaire

Mais ce sont surtout les objectifs et les conditions de ces engagements qui sont en question. Le Liban, par exemple, malgré les règles d'engagement « robustes » affichées, n'a qu'à moitié satisfait les militaires français. Ils auraient préféré une force ad hoc, alors que chausser les pantoufles de la Finul les a obligés à composer avec la machine onusienne.

À l'Élysée comme à l'état-major des armées, on a le souci de ne plus « gaspiller du Casque bleu », dans des opérations où l'engagement militaire sert de substitut à l'action politique. Le 13 juillet, le chef de l'État a ajouté que la politique de projection militaire devait être assortie « d'objectifs clairs et jugée sur des résultats concrets ». Pour éviter les risques d'embourbement, les missions de formation des armées locales sont privilégiées sur les responsabilités de contrôle du terrain. C'est le cas en Afghanistan, où Paris va renforcer ses équipes d'instructeurs au sein d'unités afghanes opérationnelles (OMLT), faisant passer ces effectifs de 50 à 200 hommes. L'un d'entre eux a été tué la semaine dernière.

L'autre préoccupation des états-majors, c'est de trouver un équilibre entre l'engagement à l'extérieur et la préparation de l'avenir. Les Opex, qui mélangent souvent des missions de police et d'assistance, apportent l'expérience du terrain mais n'aident pas à acquérir des savoir-faire militaires modernes. En Côte d'Ivoire, par exemple, un cuirassier va partir sans son char Leclerc, mais sur du matériel léger. Dans le dernier numéro de la revue Commentaires, des hauts fonctionnaires du ministère des Finances s'intéressant aux questions de défense signent, sous un pseudonyme commun, un article proposant une évolution vers deux types de forces distincts : des unités de stabilisation et des unités d'intervention de haute intensité, à fort niveau technologique. Le débat n'a pas fini d'agiter les armées.

L'autre nouveauté concernant les Opex devrait être un droit de regard accru du Parlement. Le président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée, Axel Poniatowski, a demandé la semaine dernière que tout engagement donne lieu à un « débat et un vote des députés et des sénateurs ». « Ils ne doivent pas être un préalable à l'envoi de troupes, mais il faudrait les organiser dans un délai de trois mois » a-t-il précisé. La France ne ferait là que rejoindre la plupart des grandes démocraties.

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